Les statuts de SAS peuvent-ils prévoir une adoption des décisions collectives par une minorité d’associés ?
Dans les SAS, les statuts déterminent la forme et les conditions des décisions qui doivent être prises collectivement (article L 227-9 du code de commerce).
Cette liberté leur permet-elle de prévoir qu’une décision pourra être adoptée par une minorité d’associés ?
La Cour d’Appel de Paris avait répondu positivement et validé une décision prise par une minorité d’associés d’une SAS, en relevant que les statuts autorisaient l’adoption de décisions collectives à la majorité d’un tiers seulement, des droits de vote des associés présents ou représentés.
La chambre commerciale de la Cour de Cassation censure cette décision : la liberté laissée aux associés d’une SAS pour rédiger les statuts trouve sa limite dans la nécessité d’instituer une règle d’adoption des résolutions soumises à l’examen collectif des associés qui permette de départager ses partisans et ses adversaires.
Ainsi une clause statutaire stipulant qu’une résolution est adoptée lorsqu’une proportion d’associés représentant moins de la moitié des droits de vote présents ou représentés s’est exprimée en sa faveur, ne permet pas ce départage puisque les partisans et les adversaires de cette résolution peuvent simultanément remplir cette condition de seuil.
Elle en déduit que les résolutions d’une SAS ne peuvent être adoptées par un nombre de voix inférieur à la majorité simple des votes exprimés et, en conséquence, casse l’arrêt d’appel (Cass com 19 janvier 2022 n°19-12.696).
Cependant, la Cour d’Appel de Paris à laquelle l’affaire est ensuite renvoyée, refuse de suivre ce raisonnement et valide à nouveau la décision prise par un vote minoritaire des associés.
L’Assemblée Plénière de la Cour de Cassation ultérieurement saisie, clôt le débat : en suivant le raisonnement de la chambre commerciale, elle rappelle, en premier lieu, le droit de tout associé de participer aux décisions collectives consacré par l’article 1844 du code civil, l’article 1844-10 réputant non écrite toute clause contraire.
Elle ajoute qu’une décision collective ne peut être tenue pour adoptée que si elle rassemble en sa faveur le plus grand nombre de voix. Toute autre règle conduirait à considérer que la collectivité des associés peut adopter, lors d’un même scrutin, deux décisions contraires.
Elle en déduit que « la décision collective d’associés d’une société par actions simplifiée, prévue par les statuts ou imposée par la loi, ne peut être valablement adoptée que si elle réunit au moins la majorité des voix exprimées, toute clause statutaire contraire étant réputée non écrite ». (Cass Ass Plénière 15 novembre 2024 n°23-16.670).
Conclusion : une décision collective s’entend d’une décision adoptée à la majorité des voix. La liberté dont bénéficie les associés pour rédiger les statuts des SAS ne peut permettre d’écarter cette règle.