Selon les dispositions de l’article L227-16 du code de commerce, les statuts d’une société par actions simplifiée (SAS) peuvent, dans les conditions qu’ils déterminent, prévoir qu’un associé peut être tenu de céder ses actions.

Le second alinéa de l’article L. 227-19 du même code, prévoit que les clauses statutaires mentionnées à l’article L. 227-16 ci-dessus, ne peuvent être adoptées ou modifiées que par une décision prise collectivement par les associés dans les conditions et formes prévues par les statuts.

L’unanimité n’étant pas exigée par ces textes, un associé peut donc être contraint de céder ses titres sans avoir consenti à son exclusion.

En conséquence, il a été demandé au Conseil Constitutionnel de se prononcer sur la conformité de ces dispositions avec les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 qui protègent le droit de propriété :

  • Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l’oppression (article 2).
  • Selon les dispositions de l’article 17, la propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité.

Le Conseil Constitutionnel a jugé que les dispositions sus visées du code de commerce étaient conformes à la Constitution.

Au regard de l’article 17 :

Il considère que les dispositions du code de commerce ont pour seul objet de permettre à une société par actions simplifiée d’exclure un associé en application d’une clause statutaire pour garantir la cohésion de son actionnariat et assurer la poursuite de son activité.

Pour le Conseil Constitutionnel, elles n’entraînent donc pas une privation de propriété au sens de l’article 17 de la Déclaration de 1789.

Au regard de l’article 2 :

Il rappelle que l’article 2 de la Déclaration de 1789 autorise les atteintes portées à ce droit si elles sont justifiées par un motif d’intérêt général et proportionnées à l’objectif poursuivi et juge que les dispositions contestées ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit de propriété compte tenu de l’encadrement dont elles font l’objet par la jurisprudence et certaines dispositions légales.

En effet :

  • la Cour de Cassation exige que la décision d’exclure un associé ne soit prise qu’à la suite d’une procédure prévue par les statuts et repose sur un motif stipulé par ces statuts, conforme à l’intérêt social et à l’ordre public, et qu’elle ne soit pas abusive.
  • l’exclusion de l’associé donne lieu au rachat de ses actions à un prix fixé par les statuts, ou par l’accord des parties, ou, à défaut, par un expert désigné dans les conditions prévues à l’article 1843-4 du code civil.
  • la décision d’exclusion peut être contestée par l’associé devant le juge, auquel il revient alors de s’assurer de la réalité et de la gravité du motif retenu. L’associé peut également contester le prix de cession de ses actions.

Dès lors, pour le Conseil Constitutionnel, le grief tiré de la méconnaissance du droit de propriété garanti par la Constitution doit être écarté.

(Conseil Constitutionnel. Décision n° 2022-1029 QPC du 9 décembre 2022)